BORN TO RISE

Texte de Manon Canto

Née en 1997, formée à la Central Saint Martins et aux Beaux-Arts de Paris, Constance Lafonta développe une pratique pluridisciplinaire qui mêle peinture, sculpture et installation, au croisement de l’introspection et de la scénographie.

Dans son œuvre, une ligne de vie presque invisible relie des corps solitaires à des fresques découpées, des figures suspendues à des paysages mentaux. Depuis ses premiers dessins aux Ateliers de Sèvres, elle capte l’écho de nos solitudes partagées, à la lisière de l’immobilisme et du mouvement. D’abord portée par le dessin, la gravure, la peinture ou la photographie, sa pratique explore l’intime, les retraits, les états d’âme et les zones d’ombre. Les autoportraits deviennent alors des miroirs psychiques, fragmentés et poreux, où l’artiste se confronte à ses propres métamorphoses.

À un moment de bascule, nourri par une rupture amoureuse, Constance Lafonta transforme l’image en lieu. L’espace s’ouvre, le cadre s’efface. Le mobilier — bancs, tables, structures métalliques — devient le socle d’un glissement progressif vers l’installation, où le spectateur est désormais invité à entrer. Ce déplacement s’accompagne d’un changement d’échelle, mais surtout d’un renversement de posture : il ne s’agit plus de représenter, mais d’incarner. Cette mutation témoigne aussi d’un intérêt croissant pour l’architecture, la scénographie et les relations entre forme et matière. Ce passage à l’espace donne au geste une force nouvelle : celle d’un rituel cathartique, où chaque installation devient un lieu de dépôt, de transformation, de possible libération.

Plus qu’une simple mise en lumière d’une œuvre, cette exposition retrace un chemin de transformation intérieure. Pensée comme une traversée en trois temps — l’Élévation, l’Immobilisme, le Chemin vers la renaissance — elle propose une narration sensible, presque biblique, du passage de l’ombre à la lumière. Chaque salle articule une étape de ce processus initiatique, un seuil vers l’apaisement. Les choix scénographiques eux-mêmes — matières, échelles, vides — traduisent un souci constant de faire du lieu un espace actif, presque thérapeutique.

Constance Lafonta signe ici une exposition-manifeste : un art de la traversée, où les œuvres ne se regardent plus seulement, mais s’habitent. L’espace est pensé comme un lieu de dépôt et de révélation, un geste cathartique à l’échelle du corps.

  • Pièce 1 : L’Élévation

    Dans cette première salle, Constance Lafonta fait un pas décisif vers l’abstraction. En renonçant à la figuration, elle s’ouvre à une géométrie instinctive, émotionnelle, où la forme devient pulsation. Des toiles monumentales aux compositions ascendantes traduisent un élan vital, presque spirituel. Encadrées de structures métalliques qui rappellent à la fois l’architecture brutaliste et l’esthétique du mobilier liturgique, elles instaurent un dialogue fort entre fragilité intérieure et rigueur formelle. L’installation impose une lecture verticale de l’espace, une élévation symbolique, comme un désir d’échapper à la gravité du corps. La spiritualité qui s’en dégage est laïque, sensorielle, presque physique. Elle infuse l’architecture même des œuvres, dans la manière dont une découpe suggère un passage, un seuil, une projection. L’œuvre n’est plus fenêtre : elle devient portail.

    Pièce 2 : Immobilisme

    En franchissant la porte symbolique de cette deuxième salle, le visiteur entre dans un temps de friction. L’élan de l’Élévation se heurte ici à la densité du vécu, à la chute nécessaire pour renaître. La figuration réapparaît par fragments, sous la forme de céramiques lourdes, de silhouettes découpées, de traces. Le métal y est omniprésent, découpé au laser, poli ou brut, porteur d’une mémoire blessée. Ce retour à la matière fait œuvre de confrontation : chaque pièce évoque une tension entre réparation et abandon. Le long du mur, une bibliothèque métallique s’étire comme un axe de pensée ou une colonne vertébrale, élevant sculptures et dessins au rang de reliques laïques. L’assemblage de ces éléments compose une scénographie introspective où l’espace devient mémoire, et le poids, nécessaire.

    Escalier : Le Chemin vers la Renaissance

    L’escalier, espace charnière de l’exposition, condense la dynamique de transformation. Il devient le lieu d’un passage entre les ténèbres et la lumière, entre l’épreuve et la réinvention. Chaque panneau disposé en vis-à-vis forme une narration silencieuse, une alternance de chaos et d’apaisement, de chute et de réparation. Les formes, plus épurées, plus affirmées, signalent un renouveau formel. L’abstraction y devient langage de l’âme. En tension constante entre structure et intuition.

  • Artiste plasticienne

    Née en 1997 | Paris, France

    Expositions personnelles

    2025

    Born to rise, espace le 78, Paris

    2023

    Fragments, Galerie Deylau, Paris

    2022

    DNSEP, École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, Paris

    2020

    Espace Pomereu, Paris

    2019

    Galerie A demain, Paris

    Expositions collectives

    2025

    Miroirs, galerie Dumonteil, Paris

    2024

    Une chambre à soi, Château Lacoste

    2019

    Bruno Gadenne, Vladimir Balasanyan, Constance Lafonta, Paul Bert Serpette, Paris

    2018

    10 ans de céramique aux Beaux-Arts, ENSBA, Paris

    Résidences

    2025

    La Folie Barbizon, Barbizon

    2022

    American Academy, Rome